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REGARDS CROISÉS SUR LA POÉSIE


Cette deuxième édition de Regards croisés, a lieu à l'initiative de la Bibliothèque de Sault, en partenariat avec l'association Le Grand Sault, l'association Bibliofil, le Printemps des poètes,  les associations de spéléologie Aspa, RagaÏe, La librairie Le Bleuet (Banon) et le soutien du Département de Vaucluse.

À travers une exposition interactive, des rencontres avec des acteurs importants de la scène poétique française, un atelier d'écriture et une aventure unique de spéléologie poétique et musicale, nous proposons d'expérimenter combien la poésie creuse avec précision la matière même de la langue et qu'elle la révèle. Quelle est un véritable aiguillon, une invitation à nous laisser surprendre et peut-être à regarder le monde autrement.

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Nous remercions tout particulièrement François Girault qui a réalisé les visuels de cette manifestation, ainsi que Dominique Franck , Daniel Penez, toutes les équipes de spéléologues et les personnes qui de près ou de loin ont rendu possible cette deuxième édition de Regards croisés.

EXTRAITS

Dominique Fourcade, Outrance, utterance (extrait)

(...) disons-le, je vais sans avancer, ce n'est pas pour connaître que je vais, c'est pour m'exposer à l'inconnaissable. (...) cette voix que je rejoins hors de moi. Cette voix que je rejoins en lieu et place de moi. Cette voix qui ne m'apprend rien sur moi, ce souffle qui m'apprend que le moi n'est rien mais qui seul fait de moi l'existant, cet air qui m'apprend le poème.

Il est une voix qui soulève le monde. Cette voix n'est pas à notre disposition. Elle soulève le monde sans pudeur et comme sans effort. Cette voix est une expérience océanique.

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Arthur Rimbaud, Lettre du voyant,  à Paul Demeny, 15 mai 1871

(…) Donc le poète est vraiment voleur de feu.

Il est chargé de l’humanité, des animaux même ; il devra faire sentir, palper, écouter ses inventions ; si ce qu’il rapporte de là-bas a forme, il donne forme : si c’est informe, il donne de l’informe. Trouver une langue ;

— Du reste, toute parole étant idée, le temps d’un langage universel viendra ! Il faut être académicien, — plus mort qu’un fossile, — pour parfaire un dictionnaire, de quelque langue que ce soit. Des faibles se mettraient à penser sur la première lettre de l’alphabet, qui pourraient vite ruer dans la folie !-

Cette langue sera de l’âme pour l’âme, résumant tout, parfums, sons, couleurs, de la pensée accrochant la pensée et tirant. Le poète définirait la quantité d’inconnu s’éveillant en son temps dans l’âme universelle : il donnerait plus — (que la formule de sa pensée, que la notation de sa marche au Progrès ! Enormité devenant norme, absorbée par tous, il serait vraiment un multiplicateur de progrès !

Cet avenir sera matérialiste, vous le voyez ; — Toujours pleins du Nombre et de l’Harmonie ces poèmes seront faits pour rester. — Au fond, ce serait encore un peu la Poésie grecque. L’art éternel aurait ses fonctions ; comme les poètes sont citoyens. La Poésie ne rhythmera plus l’action, elle sera en avant.

Ces poètes seront ! Quand sera brisé l’infini servage de la femme, quand elle vivra pour elle et par elle, l’homme, jusqu’ici abominable, — lui ayant donné son renvoi, elle sera poète, elle aussi ! La femme trouvera de l’inconnu ! Ses mondes d’idées différeront-ils des nôtres ? — Elle trouvera des choses étranges, insondables, repoussantes, délicieuses ; nous les prendrons, nous les comprendrons.

En attendant, demandons aux poètes du nouveau, — idées et formes. Tous les habiles croiraient bientôt avoir satisfait à cette demande. — Ce n’est pas cela ! (...)